Des bienfaits de la politesse

Du Comte de Thet-Motou
Au Baron de Cormeraie

Des Etats-Unis d'Amérique, le 6 fructidor 2011

Mon très cher Baron,

C'est un bien étrange pays dans lequel je me trouve actuellement. Tout est à la fois si proche et si différent de nos belles contrées ! Je dirais que tout y est exagéré… même les marques de politesse : la moindre personne inconnue nous aborde comme si nous la connaissions depuis toujours.

Par exemple, en descendant de l'aéroplane, je m'apprêtais à lire les panneaux qui m'indiqueraient le moyen de transport le plus adéquat pour me rendre en ville. Eh bien, qu'elle ne fut pas ma surprise que de me faire aborder par trois personnes différentes qui me dirent qu'il y avait un train pour cela, qu'il était à moins de 5 minutes à pied, que je devrais en changer à telle station pour en reprendre aussitôt un autre et être déposé non loin de mon motel.

On dira ce que l'on veut de cette étrange attitude qui consiste à toujours vouloir aider son prochain. Mais j'y vois - outre la politesse - une petite leçon de marketing direct à notre usage.

Au fil des ans, nous avons en effet oublié que nous nous adressions à des clients, et qu'en cela, nous devions leur être reconnaissants de s'intéresser à nos produits. Je lis encore trop de missives qui me sont envoyées par de belles entreprises qui ne me parlent pourtant que d'elles-mêmes. Alors que la moindre des choses, s'adressant à moi, serait qu'elle me parlent de... moi, ou tout du moins de mes besoins éventuels.

Pourquoi à tout prix vouloir dépenser son énergie (et son argent !) pour me décrire tel produit financier qui ne serait point celui dont j'ai besoin ? Alors qu'il serait aussi simple de me faire m'interroger sur mes envies. Et me dire que mon conseiller a sans doute le produit adéquat qui correspond à celles-ci. Je suis sûr que l'on pourrait vendre un Plan Epargne Logement sans même citer le nom de ce produit. Il suffirait sans doute de mettre le doigt sur un besoin d'épargne ou d'achat immobilier en termes choisis. Au conseiller ensuite d'analyser mes propos pour y faire éclore mes besoins...

Vous me direz que c'est impossible, que l'on ne sait pas ce que ce genre d'expérience peut donner. Pourquoi ne pas faire un test ? Après tout, que coûterait l'envoi d'une missive de ce genre à quelques milliers d'exemplaires seulement ?

Vous le voyez, cher Baron, un simple atterrissage dans ce beau pays me donne des idées pour notre métier. N'ayez crainte, je vous enverrai d'autres réflexions de ce genre très prochainement.

Votre très dévoué Comte de Thet-Motou.